Retour sur l’atelier THEIA du 12 mai dernier à Montpellier : « Les utilisations de la télédétection pour les zones irriguées ».
Le 12 mai dernier s’est tenu à l’Institut Agro Montpellier un atelier construit autour des produits et des communautés des CES Theia Irrigation et Humidité du sol à Très Haute Résolution Spatiale, en partenariat avec le CNES, l’INRAE et l’Institut Agro, et avec le soutien financier du dispositif européen FPCUP — Framework Programme Agreement on Copernicus User Uptake — dédié à la promotion de l’utilisation des données Sentinel.
La question du suivi de l’irrigation et de la gestion de l’eau dans le contexte agricole constitue un défi environnemental majeur mobilisant des acteurs variés : agences de l’eau, gestionnaires d’aménagements hydroagricoles, collectivités territoriales, chambres d’agriculture, coopératives, etc., ainsi que la communauté scientifique développant des méthodes pour y répondre. Alors que la production agricole a de plus en plus recours à l’irrigation, les changements climatiques en cours augmentent la fréquence des sécheresses, imposant à tous d’élaborer des méthodes de suivi et d’optimisation de la consommation en eau de l’agriculture. Depuis dix ans, la France voit ainsi chaque année de nombreux départements recourir aux restrictions d’eau, notamment pour l’agriculture, et 2022 ne fera pas exception. La télédétection, notamment grâce aux données Sentinel, peut contribuer à construire des réponses à ce défi.
L’organisation d’une rencontre entre gestionnaires de l’eau et acteurs de l’agriculture d’une part, et communauté de la télédétection d’autre part, repose sur de nombreuses motivations :
- diffusion et appropriation des produits existants
- connaissance du potentiel et des limites
- identification des attentes opérationnelles
- co-construction d’applications, voire de futures missions spatiales…
Les potentiels utilisateurs ont rappelé leurs principales attentes et fait part de leurs retours d’expériences. Des applications à différentes échelles de temps et d’espace : depuis le pilotage opérationnel des irrigations à la parcelle, l’optimisation de la gestion tactique et stratégique des infrastructures de transport et distribution d’eau, jusqu’à la planification territoriale face au changement climatique. La connaissance et potentiellement le contrôle des prélèvements ont également été évoqués, ainsi que de possibles applications dans le domaine de l’assurance, éclairés et enrichis par des points de vue différents.
La communauté scientifique a présenté les derniers produits d’ores et déjà accessibles, les recherches en cours et projets à venir : explications et état de l’art sur la classification de l’occupation du sol, la caractérisation de(s) l’état(s) hydrique(s), la détection ou la prévision des irrigations, la mobilisation de capteurs optiques, radar et thermiques, et le couplage avec des approches de modélisation agro-hydrologique.
En bref…
Les applications dans des contextes de grandes cultures donnent à l’heure actuelle les résultats les plus satisfaisants, en raison notamment d’une couverture plus homogène de la surface, d’une diversité relativement moindre des itinéraires techniques et d’un lien causal net entre biomasse cultivée et irrigation. Les limites sont a contrario les plus significatives dans des contextes de cultures pérennes (vigne, arboriculture) en raison de l’extrême diversité des objectifs de production, modes de conduite, gestion des inter-rangs et de l’alimentation hydrique. Les couverts complexes (cultures associées ou dérobées, maraîchage) constituent également des défis.
En conséquence, selon les contextes, les échelles d’analyse et la résolution spatiale et temporelle des données, le besoin de vérité terrain (connaissance des systèmes de culture voire des systèmes de production d’une part, et des contextes agro-hydro-pédologiques d’autre part) s’avère plus ou moins important pour calibrer classifications et modèles, et valider certaines applications opérationnelles. En outre, les systèmes d’information géographique les plus susceptibles d’accueillir ce type de données de terrain présentent encore d’importantes faiblesses, notamment sur le plan topologique (manque de concordance des objets cadastraux, culturaux ou de gestion).
Les limites liées à la résolution spatiale et temporelle des données issues de la télédétection se réduisent de manière spectaculaire. Les images satellitaires disponibles aujourd’hui offrent de hautes résolutions spatiale (10 m) et temporelle (5 jours avec les capteurs optiques S2 et entre 15 et 20 images par mois avec les capteurs radar S1), disponibles en temps quasi-réel en tout point du globe. Les données traitées sont toujours plus abouties et rendues accessibles au travers de plateformes web, et les interactions directes des utilisateurs avec les producteurs de ces données sont facilitées.
Néanmoins l’utilisateur final potentiel reste fréquemment confronté à des difficultés d’appropriation, par manque de formation et de moyens techniques, financiers et humains. Il apparaît nécessaire de renforcer encore le transfert scientifique et technologique d’une part, et sans doute pertinent de mutualiser les moyens côté utilisateurs à l’aval d’autre part.
Pour aller plus loin
Retrouvez le programme de l’atelier et les liens vers les plateformes de données.